Lettre à ma fille
Comme tous les matins, tu es passée devant ce miroir,
Ajusté ce voile sur tes cheveux, qui devra tenir jusquà ce soir
Tu mas dit au revoir dun regard, avant de quitter la maison
Le bus temmène à la fac, où tu te construis un horizon.
Je suis resté immobile, jai pensé très fort à toi
Réalisant la joie immense de te voir vivre sous mon toit
Cest vrai, je ne te lai jamais dit -ni trop fort, ni tout bas
Mais tu sais ma fille chez nous, il y a des choses quon ne dit pas.
Je tai élevée de mon mieux, et jai toujours fait attention
À perpétuer les règles, à respecter la tradition
Comme lont faits mes parents (crois moi sans riposter)
Comme le font tous ces hommes que je croise à la mosquée.
Je tai élevée de mon mieux comme le font tous les nôtres
Mais étais-ce pour ton bien ? Ou pour faire comme les autres ?
Tous ces doutes qui apparaissent et cette question affreuse :
Cest moi qui tai élevée, mais es tu seulement « heureuse » ?
Je sais que je suis sévère, et nombreux sont les interdits :
Tu rentres tout de suite après lécole et ne sort jamais le samedi
Mais plus ça va et moins jarrive à effacer cette pensée :
« Tu songes à quoi dans ta chambre, quand tes amis vont danser ? »
Tout le monde est fier de toi, tu as toujours été une bonne élève
Mais a-t-on vu assez souvent un vrai sourire sur tes lèvres ?
Tout ça je me le demande, mais jamais en face de toi
Tu saisma fille chez nous, il y a des choses quon ne dit pas
Et si on décidait que tous les bien-pensants se taisent ?
Si pour un temps on oubliait ces convenances qui nous pèsent ?
Si pour une fois tu avais le droit de faire ce que tu veux,
Si pour une fois tu allais danser en lâchant tes cheveux